Réduire les risques traumatiques grâce à l’intelligence artificielle : le projet TARPON
Plus de 21 millions de passages aux urgences annuels en France sont dus à des traumatismes. Cependant, peu d’informations sont disponibles pour analyser l’origine des ces accidents traumatiques et ainsi mieux les prévenir. Le Centre Hospitalier Universitaire de Bordeaux et le centre de recherche Inserm Bordeaux Population Health à Bordeaux publient les résultats du projet TARPON sur le développement et l’évaluation d’une méthode d’analyse des textes cliniques rédigés aux urgences.
En France, environ un tiers des visites aux urgences sont dues à un traumatisme lié à un accident de la route ou un accident de la vie courante. Les traumatismes non intentionnels entraînent chaque année environ 40 000 décès, dont 21 000 décès à la suite d’un accident de la vie courante et plusieurs millions de recours aux urgences. Néanmoins, peu d'informations sont accessibles au public et aux professionnels de santé en matière de traumatisme : si l'on peut connaître la nature de la lésion principale, on ne sait rien du mécanisme qui y a conduit (accident de la route, chute…). Les connaître permettait de mettre en place des mesures de prévention et de mieux anticiper l’accueil des patients.
Améliorer la surveillance de la santé publique en matière de traumatismes
Les informations sur la cause du traumatisme sont disponibles dans le dossier médical du patient, mais sous forme de texte libre. En effet, à chaque visite d'un patient aux urgences, les personnels soignants saisissent un texte appelé « note clinique », qui décrit les raisons de la visite du patient et les circonstances dans lesquelles les symptômes sont apparus. Il serait trop long pour les professionnels de santé de classer manuellement les types de traumatisme. En revanche, le traitement automatisé de ces données peut être envisagé grâce à une méthode d'intelligence artificielle intégrant le deep learning et plus particulièrement le traitement automatique du langage.
Vers un classement automatique des passages aux urgences
Les techniques de traitement automatique du langage font l’objet de recherches intenses depuis de nombreuses années mais cette discipline a connu un bouleversement, il y a peu, avec l’avènement d’un type particulier de réseaux de neurones artificiels. Ce sont ces techniques appelées « Transformer » (le plus connu s’appelle GPT) que les chercheurs ont adaptées, appliquées et validées, en commençant par travailler sur le site des urgences adultes du CHU de Bordeaux à partir d’un échantillon de plus de 500 000 comptes rendus.
Afin d'étudier la faisabilité de la mise en place d'un observatoire national de la traumatologie en France, une équipe de chercheurs a porté le projet TARPON afin de comparer les performances de plusieurs méthodes de traitement automatique du langage en leur confiant une tâche de classification de notes cliniques.
Le projet TARPON a traité un total de 69 110 notes cliniques en texte libre liées à des visites aux urgences du CHU de Bordeaux entre 2012 et 2019. Ces données ont été extraites au hasard pour être annotées manuellement pendant cinq mois. Parmi ces notes cliniques, 22 481 étaient des traumatismes.
Avec l’aide du Health Data Hub, de Bpifrance, de la région Nouvelle Aquitaine, de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) et de la Délégation à la Sécurité Routière, les chercheurs ont pu mener à bien cette étude. La méthode choisie permet de classer correctement 97% des comptes rendus contre 86% avec les anciennes méthodes. Ces performances vont permettre de mettre en œuvre, entre autres, des analyses épidémiologiques portant notamment sur l’impact des consommations de médicaments sur le risque d’accident.
Retrouvez ici le communiqué de presse publié par l'Inserm.